Le profil type de l’acheteur de crédit carbone
Un crédit carbone correspond à une tonne de CO2 évitée ou séquestrée grâce à la mise en place d’un projet de compensation carbone volontaire et monnayée ensuite sur le marché carbone volontaire (Capitaine Carbone). Contrairement aux quotas carbone, qui sont imposés par les régulations gouvernementales, ces projets reposent sur un engagement volontaire. Dans cet article, on se demande qui sont les entreprises qui achètent des crédits au marché carbone volontaire et quel est l’impact de l’achat de ces crédits sur leurs stratégies environnementales.
Les chiffres et graphiques utilisées dans cet article sont basées sur une étude d’Ecosystem Marketplace (EM). EM est une initiative à but non lucratif et une source mondiale de premier plan d’informations sur le marché environnemental. Cet organisme gère une plateforme de reporting reconnue et normalisée à l’échelle mondiale pour les données, les actualités et les informations sur la tarification du crédit du marché carbone volontaire (MCV). Les données de l’étude datent de 2022 et sont issues des 7 415 entreprises en collaboration avec le CDP (Carbon Disclosure Project).
Traits caractéristiques de l’acheteur de crédit carbone volontaire
Premièrement, les acheteurs de carbones volontaires sont majoritairement des entreprises de services (marketing, télécommunication, service support…), de l’industrie (plastique, métallurgie, bois…) ou du secteur du bâtiment (infrastructures).
Les sujets liés au climat sont pris en compte par la gouvernance de 97 % des organisations qui participent au marché volontaire du carbone. L’étude avance que les conseils d’administrations des entreprises qui acquièrent des crédits carbone volontaires sont 1,2 fois plus sensibles aux enjeux environnementaux que les entreprises qui n’en achètent pas. De même que les entreprises qui achètent des crédits carbones sont 1,2 fois plus susceptibles de communiquer leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) que les entreprises n’achetant pas de crédit.
Les acheteurs volontaires de carbone communiquent la majorité de leurs émissions indirectes (déplacements professionnels, fret, fin de vie des produits…). À l’inverse, les entreprises n’achetant pas sur le marché volontaire divulguent la majorité de leurs émissions au niveau des émissions directes (consommation d’énergie fixe) en théorie plus facile à réduire.
En 2022, l’acheteur typique de carbone volontaire achète des crédits représentant 2 % de ses émissions totales. Contrairement aux préjugés, en achetant des crédits carbones de façon volontaire, les entreprises n’évitent pas le problème des émissions de GES. Il reste 98 % des émissions sur lesquelles des actions de réduction et d’évitement sont envisageables.
Préférences de l’acheteur de crédit carbone volontaire
Contrairement aux stéréotypes de la compensation carbone, les acheteurs du marché volontaire ne font pas que planter des arbres. EM souligne que les entreprises achetant volontairement du carbone choisissent majoritairement des projets de réduction (94% des projets recensés), en lien avec les énergies renouvelables (éolien, hydraulique, solaire, biogaz et biomasse) et ensuite des projets de séquestration du carbone (6% des projets recensés), en lien avec l’aménagement de territoire (Forêt, agriculture, agroforesterie, côtier).
Impact de l’achat de crédit carbone sur les stratégies environnementales des entreprises
Certains pensent que le marché volontaire du carbone est une mauvaise idée, il permettrait aux entreprises d’acheter des crédits au lieu de réduire leurs émissions. Néanmoins, selon l’étude d’EM, les entreprises qui achètent des crédits carbone volontaires sont plus motivés pour agir plus globalement contre le changement climatique que celles qui n’en achètent pas, et leurs initiatives sont plus souvent scientifiquement approuvées : 34 % des acheteurs du MCV ont des objectifs de réduction scientifiquement approuvés par le SBTi (Science-Based Target Initiative) contre seulement 10 % des entreprises classiques.
Comme énoncé précédemment, la stratégie des clients du marché volontaire s’inscrit dans une réflexion plus large sur l’ensemble des émissions dont ils sont responsables. Les émissions indirectes étant le secteur d’émission le plus important de ces entreprises, celles-ci mettent en place des stratégies globales à hauteur de 51 % et dépensent 3 fois plus en activités de réductions des émissions que les entreprises n’achetant pas de carbone volontairement (1 338 557 $ contre 447 220 $).
Dans cette vision financière, l’achat de crédit carbone sur le marché volontaire pourrait permettre de définir un prix interne des émissions de GES utilisé pour gérer les risques liés au climat, identifier les opportunités liées au climat, passer à des activités d’écoconception ou bas-carbone (activités à faibles émissions) et modifier les comportements internes au sein de l’entreprise. 44% des acheteurs volontaires de carbones ont cité un prix interne sur le carbone qui a conduit leurs investissements dans des activités de réductions des émissions en 2021.
Conclusion
L’étude d’Ecosystem Marketplace montre que les crédits carbone jouent un rôle essentiel dans les stratégies climatiques des entreprises. La majorité des projets de compensation sont en fait des projets de réduction de CO2 (souvent liés aux énergies), tandis que les projets de séquestration (plantation d’arbres par exemple) ne représentent qu’une petite partie.
Les crédits carbone ne donnent pas bonne conscience aux entreprises, mais viennent tout simplement dynamiser et maintenir l’action climatique en interne. A travers les projets, Climat Local participe à cette prise de conscience en privilégiant la proximité et l’aspect participatif pour maintenir l’engagement des collaborateurs.
Source :
Forest Trends’ Ecosystem Marketplace. 2023. “All in on Climate: The Role of Carbon Credits in
Corporate Climate Strategies”. Washington DC: Forest Trends Association.